Plus célèbre par ses films parlants que pour sa contribution au cinéma muet, André Brunot fut d'abord un immense comédien de théâtre dont l'apport ne peut être oublié. Il débuta très jeune aux Bouffes du Nord, figurant dans Ruy Blas, acteur de mélodrame, puis simple « cadet » dans l'ombre de Coquelin-Cyrano, avant d'être refusé au Conservatoire en 1898 et d'y être enfin admis en 1901 dans la classe de Silvain. Élève, il prit le nom d'André Brun pour jouer en 1902 Madame Flirt, de Gavault et Berr, à l'Athénée. Premier prix de comédie en 1903 dans Mascarille des Précieuses Ridicules, il débute au Théâtre-Français le 15 septembre dans ce rôle, avant d'être affiché dans Hernani. L'emploi stipulé par le contrat, « jeunes comiques et utilités », lui permettra d'interpréter peu à peu presque tout Molière, et Beaumarchais, Courteline. À la veille d'être nommé sociétaire en 1910, André Brunot se voit proposer de reprendre sa liberté, pour créer ailleurs Chantecler, à la place de Constant Coquelin disparu l'année précédente. Il refuse, et devra attendre vingt-cinq ans avant de jouer cette pièce rue Richelieu, de faire entrer enfin Cyrano au répertoire et d'étinceler dans ce rôle. Béatrix Dussane, dans Dieux des planches (Flammarion, 1964), voit en Brunot « un successeur évident de Coquelin. Même heureuse voix de ténor, même rayonnement de gaîté, et peut-être une sensibilité plus riche, une spontanéité plus Franche ».